Zoom sur l’Inde - Une économie en mutation


Une économie en mutation, qui appelle à des financements massifs du secteur privé et des investisseurs internationaux

Dans le paysage mondial, l’Inde est un pays à part, au regard de sa population comme de son économie. Sa population a doublé en 20 ans et atteindra en fin d’année 1,46 Mds d’habitants. Cela en fait un concurrent sérieux pour la Chine, dans une relation ambiguë à mi-chemin entre concurrence mondiale et alliance géo-économique ; le fossé politique quant à lui est assumé et n’entre que ponctuellement en ligne de compte. A l’aune de la profitabilité économique, l’Inde comme la Chine jouent la carte du pragmatisme. En Inde, tout est toujours démultiplié, et le pays doit faire face à un défi des temps modernes : comment conjuguer à cette échelle croissance démographique, croissance économique et croissance du besoin énergétique.

 Qi Hang Zhao,

Analyste chez IVO Capital Partners,

La vue à long terme d’IVO Capital Partners

  • ELECTIONS LEGISLATIVES - Les élections devraient reconduire Narendra Modi à son poste de Premier Ministre et garantir une continuité dans la stratégie économique du pays.
     
  • ECONOMIE INDIENNE - Le virage économique indien des dix dernières années se révèle gagnant : l’Inde a fait d’énormes progrès en matière de macro-stabilité, a réduit considérablement ses déficits (notamment en rééquilibrant sa balance commerciale) et son PIB ne cesse de croître. Elle est considérée aujourd’hui comme stable et attractive, grâce aussi à sa main-d'œuvre qualifiée et nombreuse ; elle attire de fait les secteurs manufacturiers et les chaînes d’approvisionnement qui souhaitent se désinvestir en Chine.
     
  • PERSPECTIVES - Le gouvernement a beaucoup investi au cours des deux mandats de Narendra Modi (2014-2024) ; la dette centrale a augmenté et il n’a plus de marge de manœuvre ; les investissements futurs doivent être financés par le secteur privé national et étranger, qui dispose de ressources conséquentes.
     
  • OPPORTUNITES - L’Inde offre des opportunités d’investissement sur des secteurs clefs de l’économie : infrastructures (ports et aéroports) et les énergies renouvelables. Ce sont devenus des secteurs attractifs, ils répondent à la mutation nécessaire de l’économie mondiale.

Elections législatives 2024 : une Probable continuité au pouvoir

Héritage de la colonisation britannique, l’Inde fonctionne comme une République fédérale et a adopté le système parlementaire britannique : le chef de l’Etat n’a qu’un rôle cérémonial tandis que le chef du gouvernement exerce le pouvoir. L’Inde fonctionne parallèlement avec un système fédéral de gouvernements pour ses 28 Etats, comme les Etats-Unis. La Chambre du peuple (Le Parlement indien) est élue au suffrage universel direct pour un mandat de 5 ans. C’est le renouvellement de cette chambre qui conduira l’ensemble de la population aux urnes au cours de ces deux mois, du 19 avril au 1er juin.

 

Ces élections ne laissent pas présager de bouleversement politique. Candidat à sa réélection, Narendra Modi est membre du Bharatiya Janata Party (BJP) et premier ministre de l’Inde depuis 10 ans. Il est cette année encore donné vainqueur, et la croissance de l’Inde durant la dernière décennie est à mettre à son actif, conduite pour partie par sa volonté de réformes structurelles.

L’économie indienne : une proposition devenue attrayante par sa macro-stabilité, ses investissements et la réduction de ses déficits

A la suite de son indépendance, en 1947, l’Inde observe avec intérêt le modèle de développement soviétique et adopte à son tour un système de planification, qui perdure aujourd’hui. Les années 1990 marquent un tournant vers une politique économique plus libérale, dans le but de multiplier les échanges mondiaux. L’économie indienne est dominée par le secteur des services : il contribue à hauteur de 63% du PIB en 2022, suivi par l’industrie (22%) et l’agriculture (15%).

 

Autrefois vulnérable, l’Inde des années 2020 est devenue la 5ème puissance mondiale. La prévision de croissance pour 2024 est de 6,4%, soutenue par la forte demande intérieure ; l’inflation, après quelques années de forte hausse, devrait être maîtrisée autour de 4%. La présidence de Narendra Modi a contribué à cette inflexion positive, comme en témoignent l’évolution de la croissance et de la dette au cours des dix dernières années.

Croissance du PIB de l’Inde

Par ailleurs, la solidité de ses comptes de réserves de change par rapport à sa dette à court terme ainsi que la diversité de ses financements atténuent l’exposition du pays aux chocs extérieurs.

L’Inde absorbe chaque année entre 10 et 12 millions de nouveaux entrants sur le marché du travail ; Cette main d’œuvre anglophone est relativement bien formée, ce qui facilite l’internationalisation de l’offre indienne. De plus, l’Inde fait la promotion du « Made in India » et rappelle son attractivité grâce à sa main d’œuvre compétitive : le salaire moyen en Inde est de 181 $/mois, il tourne autour de 1 050 $ en Chine.

 

C’est à la fois une chance et un défi économique sans cesse renouvelé, qui stimule aussi le développement des infrastructures et des services publics pour répondre à la demande interne. La consommation nationale est un acteur important de la croissance, et l’émergence d’une classe moyenne indienne fait partie de l’équation.

Perspectives présentes : Le financement de la croissance doit évoluer en faveur des investisseurs privés et étrangers afin de relayer les investissements étatiques.

Jusqu’alors, la croissance et le développement de l’Inde ont été majoritairement financés par le gouvernement et l’Etat ; la dette publique est passée de 65% à 86% en dix ans.

C’est maintenant au secteur privé et aux investisseurs étrangers de prendre le relais afin de financer la deuxième phase de la croissance du pays. Le secteur privé indien est faiblement endetté par rapport à d’autres pays ; il a la capacité de répondre à l’appel à l’investissement lancé par le gouvernement.

Les investissements structurels sont devenus une priorité et le gouvernement pilote cette mutation en favorisant les investissements privés et étrangers. De nouveaux plans économiques voient le jour sous la gouvernance de Narendra Modi : Le National Infrastructure Pipeline (NIP) prévoit l’injection de 1 200 Md$ entre 2020 et 2025, pour la modernisation d’infrastructures dans différents secteurs. Depuis 2020 aussi, le Production Linked Incentives (PLI) promeut la fabrication nationale, des panneaux solaires aux ateliers de manufacture.

 

Le prochain mandat de Narendra Modi devrait être marqué par des investissements importants dans les infrastructures afin de stimuler la croissance et de continuer d’attirer les investisseurs internationaux, à la faveur de leur relatif désintérêt pour la Chine.

Opportunités : Vers une transformation profonde des sources d’énergie

L’Inde est aujourd’hui le 3ème consommateur d’énergie au monde, et sa consommation a doublé en 20 ans. L’inde est très fortement dépendante au charbon, tant par sa consommation (44% du mix énergétique en 2021) que pour l’exportation ; la production nationale d’énergie est pour moitié produite au charbon, et le pays exporte une partie de cette énergie en USD, ce qui vient soutenir sa balance commerciale. La consommation nationale en gaz est en revanche très faible, de l’ordre de 6%. L’Inde est à ce jour très dépendante des énergies fossiles, comme le montre le mix énergétique total de 2021 ci-dessous.

Génération intérieure d’électricité, Inde, 2021

Mix énergétique total, Inde, 2021

L’Inde réalise de gros plans d’investissements dans le renouvelable, par le biais notamment de joint-venture avec des entreprises étrangères, comme Total Energies & Adani, qui ont déjà développé des installations d’infrastructures dans le secteur. Ils favorisent le solaire, compétitif par nature (peu d’Opex) dans une grande partie du pays. Le financement de ces infrastructures s’effectue en majorité sous forme de green bonds.

 

L’énergie solaire fournit 2,38% de la demande en 2021 (voir tableau de la génération intérieure d’énergie), et l’Inde affiche de grandes ambitions en la matière, avec pour objectif une égalité stricte entre le solaire et le charbon à horizon 2040 en matière de production d’électricité. Le potentiel solaire du territoire indien est important ; outre la surface du pays, l’Inde est un pays tropical et des régions comme le Rajasthan ou le Cachemire présentent un potentiel solaire très important. La grande difficulté indienne réside dans le stockage énergétique car si le pic de production de l’énergie solaire se situe en milieu de journée, le pic de consommation se situe lui en fin de journée, alimenté notamment par la sollicitation des climatiseurs. Ainsi, le développement de batteries de stockage court terme jouera pour beaucoup dans la capacité de l’Inde à évoluer vers un mix énergétique plus équilibré, et à réduire sa consommation de charbon.

L'Inde est devenue un pôle d'attraction pour les investisseurs ; cela s’est traduit par d'importants afflux de capitaux et par une baisse des coûts d'emprunt pour le pays, le niveau actuel des spreads étant plus serré que ceux de l'Asie et de l'Amérique latine. Ces tendances positives récentes se reflètent dans les valorisations actuelles, en particulier dans les segments favorables des infrastructures et des services publics. Nous trouvons quelques opportunités d’investissement dans les entreprises indiennes, comme dans les secteurs des infrastructures et énergies renouvelables. Les entreprises indiennes du portefeuille proposent généralement une marge EBITDA élevée, une visibilité claire sur la génération de liquidités grâce à leurs contrats à long terme, des économies d'échelle et une diversification géographique. La plupart d'entre elles bénéficient également du soutien de solides actionnaires institutionnels. Nul doute que le secteur privé indien sera un des grands acteurs du marché obligataire international des 10 ou 20 prochaines années compte tenu des besoins de financements massifs qui accompagnent la transformation dun pays et dune économie de cette dimension, le tout dans un contexte de transition énergétique mondialement imposée. Par exemple, notre fonds IVO Short Duration est exposé en Inde à hauteur de 7,39%, dont quasi la moitié dans le secteur du renouvelable, pour un rendement en USD de 7%.

Les sources des données chiffrées et graphiques utilisés dans ce document sont la Reserve Bank of India, IVO CAPITAL PARTNERS, CEIC, le Monde, l‘Agence internationale de l’énergie (www.iea.com), Freedom House et le site de donnéesmondiales.com


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